Surpoids et obésité, généralités

Surpoids et obésité, généralités

Par Anne-Marie Bertrand, Pédiatre

Définitions et diagnostic

Le surpoids et l’obésité sont définis comme une accumulation anormale ou excessive de graisse qui présente un risque pour la santé selon l’Organisation Mondiale de la Santé. L’obésité est une pathologie chronique, à début plus ou moins précoce, mettant en cause le bien être physique, psychologique et social de l’individu. Elle traduit un déséquilibre entre les apports et les besoins énergétiques.

L’indice de masse corporelle (IMC), bon reflet de l’adiposité (accumulation de graisse dans les tissus cellulaires), est le meilleur critère diagnostique et pronostique de surpoids et d’obésité chez l’enfant. Il se calcule à l’aide de la formule : IMC (kg/m²) = Poids (kg) / Taille² (m).

Chez l’adulte, on parle de surpoids lorsque l’IMC se situe au-delà de 25, d’obésité au-delà de 30.

Chez les enfants et les adolescents, il n’est pas possible de définir un seuil d’indice de masse corporelle car la corpulence varie physiologiquement au cours de la croissance et en fonction du sexe, nécessitant de se référer à des courbes de référence (figure 1).

En France, on utilise les courbes de référence françaises et les seuils de l’International Obesity Task Force (IOTF). Les courbes de corpulence de référence françaises sont établies en centiles, permettant de définir les zones d’insuffisance pondérale (< 3e percentile), de normalité (3e -97e percentile) et de surpoids (> 97e percentile) depuis la naissance jusqu’à l’âge de 18 ans. Au cours de la croissance, la corpulence augmente la première année de la vie, puis diminue jusqu’à l’âge de 6 ans et croît à nouveau jusqu’à la fin de la croissance. La remontée de la courbe de l’IMC observée en moyenne à l’âge de 6 ans est appelée rebond d’adiposité.

Un enfant est en situation de surpoids lorsque sa corpulence se situe au-delà du 97e percentile des courbes de référence françaises. L’enfant est en situation d’obésité lorsque sa corpulence le situe au-dessus du seuil de l’IOTF-30.

Plus que le niveau de corpulence en lui-même, il est important de suivre l’allure évolutive de la courbe : une ré ascension trop précoce de la courbe (avant 5 ans) est appelée rebond d’adiposité précoce, facteur de risque majeur de surpoids et d’obésité ultérieurs. Son repérage est précieux car il précède un surpoids visible cliniquement.

Figure 1 : Courbes de corpulence françaises et seuils de l’IOTF pour les filles. Rolland Cachera

Cette mesure de la corpulence est complétée idéalement par celle du tour de taille ; si le rapport tour de taille/taille est supérieur à 0,5 dès l’âge de 6 ans, il existe une obésité abdominale, facteur de risque cardio-vasculaire et métabolique.
Le tour de taille est mesuré sur un enfant debout, bras écartés, torse nu, en respiration libre, mètre ruban souple positionné à mi-distance entre la dernière côte et la crête iliaque ou au niveau du périmètre abdominal le plus petit.

Surveillance de la corpulence et rebond d’adiposité

Cette évolution doit être suivie par le médecin traitant de l’enfant sur la courbe de corpulence, dans l’idéal, 2 ou 3 fois par an (de la naissance à 2 ans : au minimum 3 fois par an ; après l’âge de 2 ans : au minimum 2 fois par an).

Il est recommandé d’être vigilant aux signes d’alertes suivants :

  • Ascension continue de la courbe depuis la naissance
  • Rebond précoce (plus il est précoce, plus le risque de devenir obèse est élevé)
  • Changement de couloir vers le haut, car associé à un risque plus élevé de développer un surpoids et une obésité

Les professionnels de santé (médecin traitant, pédiatre, professionnels des services de Protection maternelle et infantile ou de santé scolaire) ont un rôle important de dépistage de ces signes d’alerte pour amener, avec bienveillance, la famille à comprendre cette évolution et à y remédier.
L’obésité chez l’enfant présente un risque important de persistance à l’âge adulte. La probabilité qu’un enfant obèse le reste à l’âge adulte varie selon les études de 20% à 50% avant la puberté, à 50% à 70% après la puberté.

Situation de surpoids, d’obésité chez les enfants présentant un handicap

Un enfant porteur d’un handicap, quel qu’il soit, est plus à risque de développer un surpoids ou une obésité, qui peut retentir fortement sur sa qualité de vie et constituer un « double handicap ».

L’obésité, favorisée par des facteurs comportementaux, comme la sédentarité, les compulsions alimentaires, le manque d’activité physique et des facteurs hormonaux et métaboliques est une des complications préoccupantes du handicap par son retentissement somatique.

D’une manière générale, le risque d’excès de corpulence est de 1,5 à 2,5 fois plus élevé que celui des enfants du même âge sans handicap. De nombreux facteurs sont intriqués, individuels, familiaux, professionnels et sociétaux. La situation s’aggrave avec l’âge, parallèlement aux difficultés du parcours de vie.

Tableau 1 : Prévalence de l’excès de corpulence (surpoids + obésité) chez les enfants et adolescents en situation de handicap mental

Revue de la littérature, extrait du livre Pr RICOUR IME LA GABRIELLE, « Obésité et handicap mental, ce n’est pas une fatalité. Recherche action à l’institut médico-éducatif de La Gabrielle, MF Pass. » 

Les facteurs de risque de surpoids /obésité sont les mêmes que pour tout enfant et sont souvent cumulés, nécessitant de repérer l’obésité d’un ou des deux parents, leurs comportements, leurs habitudes de vie par rapport à l’alimentation, à la sédentarité et l’inactivité physique. Une attention particulière doit être portée au contexte socio-économique des familles (dont les situations de précarité financière), à leur vulnérabilité (éducationnelle, structure parentale…).

Le parcours préalable de l’enfant au travers de diverses institutions (avec des adaptations successives demandées) et le mode de prise en charge (IME en semi externat, internat, classes externalisées, prise en charge à domicile type SESSAD …) sont aussi à prendre en compte.

Les conséquences pour la santé doivent être comprises par les professionnels et les parents. Les risques sont cardio-vasculaires, respiratoires, métaboliques, orthopédiques… sont évitables mais il ne faut pas attendre une normalisation spontanée (mythe de la puberté réparatrice) puisqu‘il y a plutôt une aggravation à l’âge adulte.

L’impact du problème de poids sur la vie quotidienne de l’enfant et de l’adolescent (essoufflement, douleurs articulaires, gêne à l’habillage, difficultés de déplacements, troubles du sommeil, fatigue…) et dans ses relations avec les autres (stigmatisation, moqueries, accentuations de troubles anxieux et dépressifs) est à évaluer. La souffrance de l’enfant n’est pas toujours bien identifiée par l’entourage (famille, professionnels). Cette situation génère de la culpabilité chez les familles et questionne les soignants.

Elle nécessite une mobilisation de l’institution sur les deux volets de prise en charge et de prévention.

Constipation

Constipation

Par Irène Benigni, Diététicienne, spécialisée dans l’alimentation des personnes avec polyhandicap

Symptômes de la constipation
  • Une fréquence d’exonération supérieure à deux jours
  • Des selles dures
  • Une alternance de selles dures et de selles liquides
  • Des efforts de poussée importants

Elle est source de douleur, de ballonnements, d’inconfort et peut s’aggraver par la formation d’un fécalome et d’une occlusion.

Ses causes principales de la constipation

Souvent plusieurs de ces facteurs sont impliqués.

  • Le manque d’activité physique,
  • Certains traitements médicamenteux (notamment neuroleptiques, anti-épileptiques, psychotropes)
  • L’insuffisance d’apport de boissons et de fibres,
  • Une texture des repas inadaptée aux possibilités masticatoires de l’enfant
Conseils pratiques

Une bonne position aux toilettes : l’angle entre le tronc et les cuisses doit être inférieur à 90 degrés, penser à placer un tabouret sous les pieds des enfants.

Source : Vivre mieux, le blog

Des horaires réguliers

Préserver l’intimité et le temps

Bouger

  • Encourager la marche, le mouvement, le sport.
  • Masser l’abdomen dans le sens des aiguilles d’une montre en partant du nombril et en élargissant le cercle.

Une bonne hydratation
En moyenne il est nécessaire de boire un litre et demi par jour en évitant les boissons sucrées.
Penser aux eaux riches en magnésium.

Une alimentation riche en fibres
Les fibres permettent une augmentation de la masse et du volume des selles.
L’augmentation de la masse et du volume des selles a pour effet de stimuler les contractions coliques responsables du brassage et de la progression des selles, et ainsi de réduire le temps de transit. Les gaz coliques produit par la digestion des fibres par la flore contribuent à cette stimulation du péristaltisme.

Pour enrichir l’alimentation en fibres, on veillera à proposer :

  • Des légumineuses 2 fois par semaine (lentilles, flageolets, haricots blancs, pois cassés, pois chiche…) en accompagnement de la viande, en vinaigrette ou dans un potage.
  • Des fruits et légumes crus et cuits,
  • Du potage, il n’est pas réservé aux personnes âgées, les bars à soupe deviennent très « tendance ». Soyons créatifs.
  • Des aliments complets : pain complet ou pain au son, pâtes complètes, riz complet.
  • Des fruits secs (pruneaux, abricots secs…)

En adaptant la texture des aliments aux possibilités masticatoires de l’enfant
(Voir chapitre mastication)
Des morceaux d’aliments avalés sans être mastiqués peuvent se retrouver intacts dans l’intestin (ex des grains de maïs ou des flageolets) et gêner la progression du bol alimentaire.

Par des traitements laxatifs par voie orale ou rectale sur prescription médicale

Constipation

Reflux gastro-œsophagien

Par Irène Benigni, Diététicienne, spécialisée dans l’alimentation des personnes avec polyhandicap

Définition

Le reflux gastro-œsophagien est une remontée du liquide gastrique vers l’œsophage.

Il est plus fréquent chez les enfants et les adolescents en situation de handicap mental, psychique, cognitif ou de polyhandicap.

Il est important de diagnostiquer le reflux, de le traiter et de le prévenir. En effet, en l’absence de cette prise en considération, on incrimine souvent l’alimentation en cas de troubles digestifs ou respiratoires et on impose des évictions alimentaires (sans acides, sans produits laitiers…) le plus souvent injustifiées.  

Causes du reflux gastro-œsophagien
  • Augmentation de la pression intra abdominale du fait de la constipation
  • Mastication insuffisante ralentissant la vidange gastrique par la présence de morceaux dans l’estomac 
  • Impact des traitements neuroleptiques, antiépileptiques, psychotropes sur la motricité digestive
  • Obésité du fait de la relaxation du cardia
Diagnostic du reflux gastro-œsophagien

Le diagnostic se fait le plus souvent par des signes cliniques variés et non-spécifiques, ce qui rend sa reconnaissance difficile.

Digestifs :

Régurgitations/vomissements

Nausées

Aérophagie (rots)

Mauvaise haleine

ORL :

Infections et/ou inflammations ORL fréquentes (otites, rhinites, rhino-pharyngites, angines, laryngites…)

Douleurs ou difficultés à la déglutition

Pulmonaires :

Toux, notamment la nuit et après les repas

Pneumopathies, bronchites

Asthme

Généraux :

Troubles du sommeil

Troubles du comportement

Refus alimentaires ou comportement compulsif avec l’alimentation

Fatigue amenant à découvrir une anémie

Par une pH-métrie : on mesure le nombre de pics acides dans l’œsophage pendant 24 heures à l’aide d’une petite sonde. Cet examen n’est pas douloureux mais peut être difficile à réaliser chez des enfants en situation de handicap.

Prévention et traitement du reflux gastro-œsophagien
  • La prévention et le traitement de la constipation (voir fiche sur la constipation)
  • L’adaptation de la texture des repas (mixés plus ou moins)
  • Des vêtements peu serrés à la ceinture
  • La surélévation de la tête du lit à 30° minimum la nuit
  • Sur prescription médicale, des traitements anti sécrétoires (IPP : inhibiteurs de la pompe à protons) qui agissent directement sur la production acide de l’estomac.
  • Dans certains cas, un traitement chirurgical, qui vise à remodeler le cardia pour qu’il puisse à nouveau tenir son rôle de valve à sens unique.
  • En cas d’œsophagite ulcérée, en attendant l’effet des IPP, une précaution diététique transitoire : éviter les aliments acides dont l’ingestion peut être douloureuse au passage dans l’œsophage.  
Constipation

Mastication

Par Irène Benigni, Diététicienne, spécialisée dans l’alimentation des personnes avec polyhandicap

Définition

Les troubles de la mastication sont plus fréquents chez les enfants et les adolescents en situation d’handicap mental, psychique, cognitif ou de polyhandicap.

La mastication permet de :

  • Broyer les aliments grâce aux mouvements combinés de la mâchoire, de la langue et des joues, de les homogénéiser avec la salive pour les transformer en bol alimentaire prêt à la déglutition et de réduire le risque de suffocation par obstruction des voies respiratoires.
  • Débuter la digestion de l’amidon grâce à la présence d’une enzyme dans la salive (amylase).
  • Déclencher la sécrétion des enzymes digestives.
  • Rendre accessible les nutriments aux enzymes digestives et favoriser un bon état nutritionnel.
  • Renforcer la solidité des dents.
  • Atteindre la satiété (15 à 20 minutes) en ingérant moins de calories.
  • Améliorer la digestion en réduisant les douleurs digestives (aérophagie, ballonnements, constipation).
  • Apprécier le goût des aliments (contact des molécules aromatiques avec les papilles gustatives).

La mastication d’un repas complet dure en moyenne 15 à 20 mn, en comptant en  moyenne 15/20 mastications par bouchée.

Favoriser la mastication

Il est essentiel d’observer la mastication d’un enfant.

S’il ne mâche pas suffisamment (moins de 15 mastications par bouchée), il peut y avoir différentes raisons :

Dentition

La mastication commence à partir de la présence des dents de lait vers deux ans et les molaires définitives ne poussent qu’à partir de 6 ans.

Certaines déformations de la mâchoire gênent l’enfant pour mastiquer et nécessitent un traitement par orthodontie.

Les douleurs dentaires réduisent le temps de mastication.

Il est important de veiller à une bonne hygiène bucco-dentaire et de réduire les produits sucrés, bonbons, boissons notamment.

Troubles sensoriels de l’oralité

Certains enfants, hyper-réactifs sur le plan sensoriel supportent mal certains aliments en raison de leur goût, de leur texture et de ce fait « avalent tout rond » (par évitement).

Environnement et installation à table

Un repas pris dans le calme et bien installé à table favorise une bonne mastication.

En institution, les grandes salles à manger type « cantine » sont souvent très bruyantes et les enfants y sont sensibles, particulièrement les enfants avec des troubles envahissants du développement (TED) pour lesquels des stimulations multiples et simultanées sont insupportables.

La hauteur des tables et chaises, comme à l’école, doit être adaptée à la taille des enfants. Si les pieds ne touchent pas terre, l’installation est inconfortable et l’enfant risque de manger le plus vite possible pour s’en échapper.     

De nombreux traitements médicamenteux induisent une sécheresse buccale qui gêne l’enfant pour mastiquer et ramollir le bol alimentaire. Penser à bien hydrater l’enfant avant le repas et demander conseil au médecin pour l’usage de salive artificielle.

Si l’enfant ne mâche pas, en attendant de pouvoir agir sur les causes, il est possible de proposer une alimentation moulinée ou mixée pour éviter les fausses routes accidentelles et réduire les douleurs digestives, parfois difficiles à exprimer (elles peuvent s’exprimer par des troubles du comportement). Les  injonctions de type « mâche », « attends », « pose ta fourchette »… sont à éviter afin que le repas ne devienne pas une séance de rééducation.